Suspendre et examiner sa vie - Principe #1 du Philopreneur
Dans la tête d'un Philopreneur #187
Chaque lundi à 16h30, je vous propose une réflexion et des conseils pratiques pour vous aider à vous extraire de la vie par défaut et mener une vie plus intentionnelle au XXIe siècle.
Ce que j’appelle “une vie Philopreneur”, offrant à celui empruntant son chemin d’aspirer à une vie avec plus de sens, de liberté et de sérénité.
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Bonjour à tous,
La semaine dernière, je vous ai présenté les 12 principes du Philopreneur ainsi que les 10 domaines piliers de la vie intentionnelle.
Si vous l’avez loupé, rendez-vous ici.
Aujourd’hui on attaque le premier principe : celui de la suspension suivi de l’examen de ses actions et de sa pensée.
Celui-ci sera composé de deux parties, la première dans ce mail, la suivante dans la prochaine édition.
Au programme :
L’histoire de Walter White (Breaking Bad)
Le TGV de la vie par défaut
Stéphane et les 5 commandements de la philosophie de l’autruche
Les conséquences de la non-utilisation du principe
Ouverture vers les bénéfices du principe et ses cas d’usages concrets
Principe #1 du Philopreneur : Suspendre puis examiner ses actions et ses pensées
Walter White a failli mourir sans avoir vécu.
Le personnage emblématique de la série Breaking Bad apprend au début de la série qu’il a un cancer et qu’il lui reste peu de temps à vivre.
Les mois qui suivent, vont lui faire comprendre à quel point il était passé à côté de sa vie avant cette annonce.
Pourtant, de l’extérieur, sa vie pouvait paraître plutôt bonne. Il est marié, a un fils, et est professeur de chimie dans un lycée d’Albuqerque au Nouveau-Mexique.
Sachant qu’il allait mourir, Walter est inquiet pour sa famille, il veut les mettre à l’abri financièrement, chose qu’il ne pouvait pas faire avec son salaire de prof.
C’est ainsi qu’il va devenir petit à petit le fameux Heisenberg, usant de ses talents et connaissances en chemin pour créer un empire de la drogue, dans son état et au-delà, en produisant des amphétamines d’une “pureté” inégalée sur le marché.
Tout au long de la série, Walter White va frôler la mort à plusieurs reprises, il va se retrouver dans des situations horribles, il va subir un stress comme jamais il avait connu.
Mais il se rend compte d’une chose, il s’est enfin mis à vivre. Il se sent vivant. Il n’est plus le zombie somnambule qu’il fut pendant près de 50 ans.
Ce changement progressif va lui apporter son lot de problèmes notamment avec ses proches. Sa famille va avoir du mal à comprendre ce “changement” soudain.
L’évolution de cette identité perturbe sa femme qui ne connaissait que l’homme lisse, timide, peu confiant qui devient, au fur et à mesure de la série, plus agressif, confiant, intense dans sa manière d’être au monde.
La série nous laissera chacun juger si Walter White va aller trop loin dans son processus de transformation.
Passant de l’homme pour qui tout était danger. À l’homme qui “est le danger” selon ses propres dires.
La moralité des actions du personnage ne nous intéresse pas ici.
Ce qui compte c’est le changement, la transformation d’un homme dont la vie allait se terminer sans avoir été vécue pleinement.
À celle d’un homme qui en deux ans (le temps de la série sur 5 saisons) va vivre enfin une vie qui lui correspond plus et qui en vaut la peine.
Walter a vécu par défaut sa vie, de manière non examinée pendant 50 ans.
Puis de manière intentionnelle pendant 2 ans par nécessité : celle d’une mort annoncée et imminente.
Il lui a fallu un cancer pour parvenir à vivre.
Nous allons essayer de ne pas attendre une annonce de ce type, ni même d’avoir 50 ans pour devenir un peu plus comme Walter.
C’est ici qu’entre en jeu le premier principe du Philopreneur.
Suspendre puis examiner ses actions et pensées
Le TGV qui s’arrête net en mars 2020
Suspendre son jugement, c’est comme arrêter un TGV à plus de 300km/heure.
Le seul moyen est de mettre des “feux” qui l’obligent à s’arrêter.
Dans notre société du flux continu, de la vitesse et de l’abondance d’informations, il est impossible d’arrêter le train de nos vies.
Sauf événement exceptionnel, avec la pandémie du Covid-19 qui stoppa net le TGV de milliards de personnes en 2020.
Cette période, au-delà de toutes considérations sanitaires et politiques, fut celle qui nous offre le meilleur terreau pour suspendre le temps et examiner sa vie.
Avant cela, nous vivions tous des “vies occupées”, saturées de bout en bout par de nombreuses activités parfois choisies et souvent subies.
Notre vie était ce qu’elle était, fruit d’un mélange de déterminismes, de décisions, de conjonctures, de hasard heureux ou malheureux.
Pour beaucoup, les dés étaient jetés. Ils avaient indiqué une direction que nous n’avions plus qu’à suivre.
Les confinements ont donné l’espace mental de (re)penser son existence.
De sortir pendant quelques semaines, d’une vie vécue selon les autres, des comportements et pensées automatiques, des peurs qui nous trahissent.
Nous étions en plein dans ce que Descartes appelle la suspension du jugement.
Pour lui, c’était le point de départ nécessaire à l’accès à la connaissance et à la vérité.
Pour nous, cette suspension va concerner le mouvement de nos actions et de nos pensées.
La mise en arrêt, du moins sa tentative, est le seul moyen de s’approcher de la vie examinée que préconisait Socrate.
Et dans un monde qui ne fait que s’accélérer, qui cherche à raccourcir le temps, à le rendre toujours plus productif et efficient (d’un point de vue marchand mais aussi existentiel), il aura fallu une pandémie pour nous rapprocher légèrement de ce que les sages et les philosophes nous invitent à faire depuis des millénaires.
La folie autour du covid nous a obligés à sortir le gros frein à main du TGV de nos vies.
Le lien du principe avec la vie intentionnelle
Ce principe est la porte d’entrée de la vie intentionnelle.
Celui qui ne sait suspendre et examinée ses pensées et actions, ne saura pas en mesure de mener une vie intentionnelle.
Voyez ce principe comme la porte d’entrée d’un univers parallèle, celui de ceux qui vivent de manière intentionnelle. Qui s’échappent de la pensée et action par défaut.
Nous avons parlé précédemment du spectre de l’intentionnalité.
Le principe #1 vous permet de changer la flèche de direction, de pointer et tendre vers la vie intentionnelle.
Descendez du TGV de la vie par défaut, ouvrez la porte de la vie intentionnelle et marchez petit à petit sur un chemin pas toujours facile mais qui en vaut la peine.
Mais avant d’avoir les outils nous offrant la capacité de bénéficier de ce principe, il faut comprendre les problèmes auxquels nous faisons face en tant qu’être humain vivant au XXIe siècle.
Stéphane et les 5 commandements de la philosophie de l’autruche
Le TGV de la vie par défaut
Revenons à Stéphane, l’homme qui vit par défaut et selon les autres.
Stéphane vit dans le TGV de la vie par défaut.
Sa vie semble toute tracée et elle s’accélère de plus en plus, suivant le rythme de notre société contemporaine.
En effet, le meilleur exemple en est le numérique et les évolutions technologiques nous placent dans une société de l’abondance d’informations et de données.
Celles-ci ne peuvent être traitées par le cerveau de Stéphane (et le cerveau de quiconque en passant).
Stéphane est le symbole mais aussi la victime d’un système, qui pour fonctionner se doit de faire circuler les flux de plus en plus vite (argent, marchandises, informations, données).
Ceci le poussant à vivre lui aussi plus vite, à consommer plus.
Étant le produit de la société, il n’est pas prêt à ralentir, il ne voit pas l’intérêt d’utiliser le frein.
Le moins et le lent ne font pas partie de son vocabulaire. Ralentir c’est prendre le risque de s’ennuyer, ou pire, de réfléchir.
Stéphane veut être occupé et diverti.
Comme disait le philosophe Blaise Pascal "Tout le malheur des hommes vient de ne savoir pas demeurer en repos, dans une chambre.”
Les écouteurs, les enceintes, les voitures, les boîtes de nuit, la télévision, l’Ipad.
Le bruit est partout, le silence fait peur.
Regret du passé, anxiété envers le futur et peur de la mort
Le divertissement et la fuite en avant ne suffisent pas. Stéphane est rongé par l’anxiété et souffre de plusieurs regrets en lien avec son passé.
Il ne vit pas dans le présent, il le subit.
Son incapacité à suspendre et auditer ses actions et pensées le fait souffrir mais il n’arrive pas à faire le lien entre la souffrance ressentie et la cause de celle-ci.
Il regrette de ne pas avoir osé vivre à de nombreuses reprises, manquant de courage, de perspective et étant bien trop influencé par le monde et les personnes l’entourant.
Il est anxieux quand il pense au futur puisqu’il sent qu’il n’a que très peu d’emprise sur celui-ci.
Il s’inquiète de choses qui sont totalement indépendantes de sa volonté et ne voit pas ce qu’il pourrait faire pour réduire cette anxiété.
Il a peur de la mort, ce qui est pour le coup relativement commun.
La conscience de notre mortalité qui est une particularité humaine génère des peurs existentielles que nous devons tous apprendre à gérer.
Certains en font un moteur de vie, un carburant pour mener une vie qui vaut la peine d’être vécue, une vie intense.
Stéphane, nous l’avons vu, préfère mettre sous le tapis les questionnements existentiels, ce qui ne l’empêche pas de subir les symptômes provoqués par la stratégie de l’autruche et de la fuite.
Le pire scénario serait d’avoir à se poser la question suivante : “Et si j’étais en train de passer à côté de ma vie ?”.
La vie selon les autres
Le paradoxe dans lequel vit Stéphane : c’est que les comportements qui le rendent anxieux et provoquent des regrets sont ceux qui lui permettent de “survivre”.
Il vit selon les autres.
C’est-à-dire que ses pensées et ses actions sont influencées par ce qu’il pense que les autres pensent ou attendent de lui.
Le tout dans une optique d’approbation sociale.
Cette dernière qui fut une question de vie ou de mort pendant des dizaines de milliers d’années.
Nos cerveaux étant le fruit d’une longue et lente évolution. Stéphane est encore câblé tel ses ancêtres préhistoriques qui devaient vivre en prenant en compte l’avis des membres de sa tribu.
Car se marginaliser, se faire exclure de la tribu signifiait la mort.
Vivre selon les autres était donc la meilleure stratégie pendant fort longtemps.
Il y a une tension entre vouloir devenir soi et être accepté par la tribu.
C’est la partie évolutionniste de cette tendance à vivre selon l’autre.
Nous pouvons y ajouter un aspect psychologique qui lui sera plus conditionné par l’histoire personnelle de l’individu - notamment par son enfance.
Puis, il y a la composante culturelle et structurelle (ou sociologique). Celles-ci influencent l’époque dans laquelle nous vivons qui elle-même nous influence.
Enfin il y a l’environnement direct composé principalement de la famille, des amis et des “collègues”.
Ici l’influence est directe et indirecte.
Direct car nous côtoyons ces personnes au quotidien. Indirect puisque ces mêmes personnes sont influencées par des forces extérieures à elles-mêmes.
Et donc, les individus de caractères, les individus courageux et autonomes étant denrées rares, nous nous retrouvons dans des “paniers de crabes”.
Nous voici avec notre environnement direct, dans un panier duquel nous pourrions sortir.
Celui-ci n’étant pourtant pas très grand. Mais nous ne pouvons y échapper.
Nous sommes interconnectés et interdépendants. De ce fait, vos “amis” partageant votre panier ne voudront pas vous laisser vous extraire du panier.
C’est ainsi que Stéphane va rester toute sa vie dans ce panier, peu importe qu’il ait envie de le quitter ou qu’il le trouve confortable.
La “rat race” infinie
Stéphane, en bon représentant de la vie vécue à 100% par défaut, a plongé les deux pieds en avant dans ce que l’on appelle la rat race.
Que l’on peut aussi voir comme une roue du hamster dans laquelle on court de manière effrénée vers un but que l’on atteint jamais.
C’est le problème de la vie et de la pensée par défaut. C’est le coût d’une vie non examinée.
On suit le chemin balisé que d’autres ont construit pour nous, sans se demander si ceux-ci nous correspondent ou s’ils ont un sens quelconque (pour soi et/ou le bien commun).
Les meilleurs petits soldats de la “rat race” s’en sortent généralement plutôt bien dans ce paradigme.
Les meilleurs obtiennent le statut, la richesse, le pouvoir, le confort voir l’abondance matérielle.
Un jour, ils se retrouvent en haut d’une montagne où il fait subitement froid. Eux qui pensaient y trouver la chaleur du bonheur, se retrouvent avec le silence du désespoir et de la désillusion.
Celui d’avoir poursuivi une quête vaine pendant des années.
Du moins d’avoir associé cette quête à l’obtention d’un sens, d’une sérénité ou d’une liberté recherchée.
Le déni du réel ou une vie dans le “virturéel”
Quand on ne prend pas le temps d’arrêter le TGV de sa vie, difficile de distinguer ce qui tient du réel et de l’illusion.
Stéphane, vivant selon les autres, s’époumonant dans la rat race et dépourvu de clarté mentale et de sérénité n’arrive plus à faire la part des choses.
Il passe ses journées dans un paradigme qu’il n’a pas vraiment choisi mais qui lui semble être le seul à sa disposition : son mode de vie par défaut (travail, amis, habitudes etc).
Il plonge plus de 5 heures dans le virtuel à travers l’écran de son téléphone et celui de son ordinateur personnel (sans compter les 8h de travail quotidien au “bureau”).
Le virtuel devient le réel. Il entend même dire que la réalité devient virtuelle et voit des entreprises comme Facebook/Meta heureuses de nous annoncer cette “révolution”.
Il n’a pas d’avis sur le sujet, il va suivre le train en marche comme il le fait depuis son adolescence.
Les conséquences de la non-utilisation du principe
Ne pas suspendre puis examiner ses pensées et actions est le comportement par défaut à notre époque.
Comme nous l’avions vu dans une édition précédente, ce fut toujours le cas à travers les époques.
De l’antiquité grecque malgré les “conseils” de Socrate et des écoles antiques qui suivirent (voir mon édition sur le stoïcisme), à Thoreau et son appel à la vie délibérée, à nos jours et cette tentative de philosophie intentionnelle que vous êtes en train de lire.
J’insisterai néanmoins sur le caractère nécessaire de la vie et pensée intentionnelle à notre époque.
Nous vivons une ère dont la vie par défaut n’équivaut pas à une vie d’ennui, de vide (matérielle).
Mais au contraire, à une vie remplie, une vie occupée, une vie d’engagements, une vie riche en divertissement et rencontres.
Si votre vie était une chambre, elle serait remplie de centaines de possessions et autres objets que vous n’auriez pas choisis.
Ce premier principe du Philopreneur est celui qui ouvre la porte de la vie intentionnelle.
Sans suspension et examen de son existence, pas de vie intentionnelle.
Telle la voie 9¾ dans Harry Potter, la porte menant au chemin de la vie intentionnelle n’est pas visible pour la plupart d’entre nous.
La raison : le TGV de la vie par défaut.
Une vie longue et qui passe vite.
Une vie dans laquelle on se retrouve à vivre la vie d’un autre. À jouer des personnages qui ne nous correspondent pas. Comme si vous mettiez les vêtements d’un inconnu.
À vivre selon les autres, par peur de vous faire exclure du troupeau, d’être marginalisé, ostracisé.
Mais est-ce souhaitable ?
Comme disait le sage Krishnamurti : “Ce n'est pas un signe de bonne santé mentale d'être bien adapté à une société malade.”
Il faut du courage pour arrêter le train de la vie par défaut.
“Conclusion”
Je m’arrête ici pour cette semaine.
Maintenant que nous avons vu les problèmes et les conséquences d’une non-utilisation du principe #1 du Philopreneur.
Nous verrons la semaine prochaine :
Comment le philopreneur va pouvoir utiliser ce principe
Les bénéfices de son utilisation sur votre vie intentionnelle
Quelques histoires de Philopreneurs utilisant ce principe
Des exemples concrets d’applications dans certains domaines piliers de la vie intentionnelle
Un plan d’action et de réflexions pour utiliser ce principe
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Passez une bonne semaine et à lundi prochain !
JCK from Budapest 🇭🇺
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