Devenir responsable et antifragile - Principe #4 du Philopreneur
Dans la tête d'un Philopreneur #199
Bonjour à tous,
Petite annonce avant de commencer.
Mercredi prochain (21 décembre), j’organise sur Paris (près de République) la première soirée des abonnés de la newsletter après 4 années à vous envoyer des mails chaque lundi.
L’occasion est parfaite puisque ce sera :
La semaine de l’édition #200 (je n’avais rien fait pour la 100e édition en 2020…)
De plus, cette édition #200 sera la dernière concernant les brouillons de mon livre après 5 mois à vous avoir présenté un chapitre chaque lundi.
La semaine de mon retour en France, qui coïncide aussi avec la fin d’un cycle de 18 mois de nomadisme à l’étranger.
Ça fait pas mal de raisons de vous organiser une soirée pour qu’on se rencontre enfin.
Mais aussi pour que vous puissiez rencontrer d’autres personnes qui partagent le même désir de mener une vie intentionnelle à notre époque.
L’événement est limité à 30 places.
Premiers arrivés, premiers servis.
Pour participer, il suffit de réserver votre place en 30 secondes avec le lien ci-dessous.
Vous y trouverez également toutes les informations utiles.
Passons maintenant à l’édition de la semaine.
Nous allons voir aujourd’hui la première partie du principe #4 du Philopreneur : Devenir responsable et antifragile.
Comme d’habitude, nous allons commencer par exposer le principe puis décortiquer les problèmes auxquels nous pouvons être confrontés dès lors qu’il s’agit de devenir responsable et antifragile.
C’est un chapitre qui n’était pas simple à écrire — je m’y suis repris à deux fois. C’est pour cela que vous le recevez en dernier (pour rappel, j’ai développé 7 principes du Philopreneur et de la vie intentionnelle - vous pouvez les retrouver dans les archives de la newsletter).
Au programme du jour :
Analyse du succès de Jocko Willink et du mouvement des “penseurs de la responsabilité individuelle”
Qu’est-ce que la responsabilité individuelle et l’antifragilité ?
Stéphane et le branleur nihiliste
La chaîne de Ponzi de la responsabilité
Le syndrome Patrick Bateman
La société du safe space et la génération des offensés
C’est parti !
Devenir responsable et antifragile
En 2015, Jocko Wilink, un vétéran des Navy Seals est invité sur le podcast de Tim Ferriss, l’auteur de La Semaine de 4 heures.
Cet épisode est devenu le plus écouté de l’histoire du podcast de Tim Ferriss qui a pourtant eu des superstars dans son podcast comme Matthew McConaughey, Jamie Fox ou Arnold Schwarzenegger.
L’ex militaire y présente le livre qu’il vient de publier : Extreme ownership.
Ce livre mêle récit des diverses missions auquel a pris part Willink en Irak et en Afganisthan ainsi que des conseils pratiques pour nous à devenir le leader sur lequel les autres peuvent compter, que nous soyons entrepreneur, athlète, manager ou parent.
Un thème sous jacent est la responsabilité individuelle (ou personnelle) que porte en lui chaque être humain.
Il tient à chacun d’entre nous de prendre les reines de son existence et assumer la pleine responsabilité de celle-ci.
Bien que les aléas de la vie et les interactions avec d’autres humains fassent que nous ne pouvons pas toujours être à 100% maîtres de notre destin.
Pour autant, Willink considère que nous devons par principe prendre l’entière responsabilité de nos actions, décisions, échecs mais aussi celles et ceux de nos proches.
Ceci dans une optique de développement personnel et d’amélioration de la qualité de vie de notre entourage.
7 ans plus tard au moment ou j’écris ces lignes, on peut tirer plusieurs conclusions de ce phénomène que fut la sortie de ce livre.
Ainsi que le fait de voir un Navy Seals truster la première place en termes d’écoutes sur un podcast écouté dans le monde entier et invitant des célébrités.
La data ne ment pas.
N’écoutez pas ce que disent les gens, regardez ce qu’ils font et ce qu’ils consomment.
Si le discours de Willink s’est répandu comme une trainée de poudre sur le web c’est qu’il y a une forte demande de la part d’une partie de la population qui sent qu’elle doit se reprendre en main, se responsabiliser, s’endurcir et cultiver son antifragilité.
Jocko Willink est un leader par l’action et l’exemple.
Depuis 7 ans, il montre son quotidien à travers les réseaux sociaux et ses projets.
Il est ceinture noire de Jujitsu et considère que tout être humain gagnerait à apprendre et pratiquer un sport de combat pour avoir confiance dans sa capacité à se protéger si nécessaire.
Il expose ses idées dans son livre mais aussi dans son podcast Jocko Willink Podcast dans lequel il parle principalement de la discipline et du leadership dans toutes les sphères de nos vies telles que les relations, la famille, la guerre, pour n'en citer que quelques-unes, comme de grands ingrédients du succès.
Un de ses principes phare est : “Discipline = Liberté”. Il en fit même un livre qu’il publia en 2017.
Pour Willink, la motivation ne suffit pas pour atteindre nos objectifs et vivre une vie qui vaut la peine d’être vécue.
Il faut transformer la motivation en discipline.
Comme celle du combattant qui se prépare à un combat important et va se lever tous les matins à 5 heures pour aller s’entraîner avant que sa famille ne se lève.
La discipline est un choix. Elle permet d’atteindre ses objectifs personnels et professionnels ou a minima de se donner les moyens d’y parvenir.
Elle produit de la confiance et de l’estime de soi. On devient celui qui chaque jour respecte ses engagements avec lui-même.
La liberté existe lorsqu’on est en mesure de s’extraire de nos comportements aliénants et nous tirants vers le bas.
Toutes les pensées et actions qui nous éloignent de qui nous souhaitons devenir et ce que nous aimerions réaliser.
Ceci est un exemple des valeurs qu’incarne Jocko Willink : respect, honneur, tradition, amitié, famille, discipline, engagement, responsabilité, leadership, travail.
Encore une fois, ce n’est pas un hasard si Jocko Willink est devenu aussi puissant médiatiquement.
Il y a toute une génération d’individus qui se désengage petit à petit d’un discours les invitant à chercher à réfuter leur responsabilité en cherchant un ennemi qui serait la cause de leur vie difficile.
Jocko Willink est une des réponses à cette demande.
Au même moment ou presque apparaît une autre figure majeure de notre époque, Jordan Peterson, le psychologue, auteur et conférencier canadien qui porte sensiblement le même message de responsabilisation de l’individu.
Et dans le sillage de ses deux individus en train de devenir de véritables icônes, nous avons tout un mouvement qui se crée allant du développement physique au développement intellectuel, philosophique et spirituel.
Il y a fort à parier que bien d’autres guides vont apparaître dans les années à venir tellement le besoin est important.
Nous en avons déjà des exemples frôlant parfois avec les limites comme Andrew Tate mais aussi de jeunes youtubeurs tels que le britannique Hamza ou l’américain Captain Sinbad.
Qu’est-ce que la responsabilité individuelle
C’est ce que nous allons développer maintenant dans ce principe.
L’importance d’épouser et d’assumer sa responsabilité individuelle concernant notre existence.
Tout en cultivant son antifragilité, les deux idées allant de pairs comme nous le verrons.
Commençons donc par définir ce que nous entendons par responsabilité individuelle.
C’est l’acceptation de notre responsabilité personnelle sur l’état de notre vie actuelle (niveau de bonheur, statut, santé etc).
Mais c’est aussi comme nous l’avons vu dans le principe #2, la capacité d’accepter son passé tout en se rendant responsable d’une partie de celui-ci (les actions, pensées et jugements en notre contrôle).
Aussi, c’est notre capacité à refuser un futur qui serait inéluctable, un destin immuable quoi que l’on fasse.
Il est important lorsque l’on évoque l’idée de responsabilité individuelle de ne pas la confondre avec “la faute”.
La faute c’est l’action que l’on effectue pouvant causer un problème.
La responsabilité c’est un savoir-être en amont, pendant et en aval d’une action (ou d’une faute) qui nous concerne de près ou de loin.
Nous sommes rarement fautifs de ce qu’il se passe autour de nous mais nous sommes toujours responsables de notre manière de réagir.
Si je participe à un match de football est que mon coéquipier marque un but contre son camp (et donc nous “pénalise”).
Ce n’est pas ma faute, mais c’est ma responsabilité en tant qu’équipier et leader de bien réagir à cet événement, de montrer à ce coéquipier que j’ai confiance en lui et d’envoyer de bons signaux autres membres de l’équipe.
Ainsi, j’ai pris ma responsabilité que je sois officiellement leader - par un brassard de capitaine - ou officieusement de par ma personnalité.
Votre expérience de vie sera diamétralement opposée selon votre capacité à endosser votre responsabilité dans chaque situation que la vie vous proposez.
J’ai été personnellement marqué par le conseil de Jordan Peterson qui propose à ses lecteurs de devenir l’homme ou la femme sur qui la famille pourra compter le jour de l’enterrement de notre père.
Personne ne vous demandera d’endosser cette responsabilité.
Mais le faire vous permettra de penser votre vie et de la vivre d’une tout autre manière. Et cela bien avant le jour où votre père quittera le royaume des vivants.
L’antifragilité comme conséquence de la responsabilité individuelle.
Quand j’étais à l’école primaire, j’étais un fan du manga Dragon Ball.
Celui-ci m’accompagna au collège puis au lycée. Je me rends compte maintenant que je suis dans la trentaine à quel point les valeurs de ce manga ont influencé les miennes : le courage, la résilience, l’amitié, la justice, l’honneur, l’héritage.
Dans Dragon Ball, le personnage principal Sangoku vient de Namek, une autre planète.
Il ne le sait pas au début du manga, mais il fait partie d’une famille royale et de combattants à la puissance rare : les sayans.
Or, la légende dit que lorsqu’un Sayan prend part à un combat. Si celui-ci est mis en difficulté et voit la mort de près, sa force doublera s’il parvient à survivre.
C’est le fameux “Ce qui ne te tue pas te rend plus fort”.
Je l’ai entendu pour la première fois dans ce manga.
Et il se trouve que la paternité de cette maxime nous vient du philosophe Nietzsche.
Le penseur allemand ayant lui-même expérimenté dans sa chair l’expérience de se voir mourir notamment lors de la période du milieu des années 1 880. Il frôla la mort avant d’écrire ses œuvres les plus importantes dans la fin des années de la même décennie.
L’adversité et son dépassement nous rendent plus forts, plus fiables, plus grands.
C’est ce qu’a également théorisé Nassim Nicholas Taleb, l’ancien trader devenu essayiste spécialiste en épistémologie des probabilités et un praticien des mathématiques financières.
Il est aussi un des penseurs les plus influents concernant “la gestion du risque” et les moyens à mettre en œuvre pour prospérer dans un monde incertain et chaotique.
Pour cela, il a notamment créé un concept fondamental : l’antifragilité.
Voici comment elle est définie par son auteur :
En quelques mots, l'antifragilité se définit comme la réponse convexe à un facteur de stress ou à une source de nuisance (dans une certaine mesure), se traduisant par une sensibilité positive à l'accroissement de la volatilité (ou variabilité, stress, dispersion, incertitude, et tout ce que l'on associe au champ lexical du désordre). La fragilité, quant à elle, est définie comme une sensibilité concave aux facteurs de stress, et se traduit par une sensibilité négative à l'accroissement de la volatilité.
Taleb précise également qu’il ne faut pas la confondre avec la robustesse ou la résilience :
L'antifragilité est au-delà de la résilience et de la robustesse. Le résilient résiste aux chocs et reste le même; l'antifragile s'améliore.
Tel un muscle qui s’hypertrophie pour ensuite être plus développé qu’initialement.
L’antifragilité va être un outil déterminant dans notre capacité à nous améliorer dans tous les pans fondamentaux de notre vie.
Et notre responsabilité individuelle va faciliter ce processus.
Le lien entre responsabilité et antifragilité
L'homme libre est celui qui est capable d'affronter et d'aimer la peur.
Se responsabiliser c’est s’exposer. C’est se mettre dans l’arène et être celui qui va assumer les coups, qui va devoir traiter les problèmes et trouver des solutions.
L’homme responsable est celui qui va apprendre à dépasser la peur en excitation.
Mais aussi faire de cette peur le point de départ de tout progrès.
Puisqu’une fois que l’on a traversé notre peur et que l’on est passé du connu à l’inconnu, nous mesurons à quel point nous avons fait des progrès.
Nous nous sommes renforcés, nous nous sommes améliorés. Nous sommes plus antifragile.
Aussi, être le responsable de son existence, c’est se retrouver régulièrement dans des situations que l’on aurait évitées autrement.
On est amené à devoir régler plus de problèmes, à gérer plus de situations critiques, à devoir prendre plus de décisions, à être plus sollicité physiquement, moralement et mentalement.
Chacune de ces situations créant un stress nous rendant toujours plus antifragile.
C’est une boucle vertueuse, la responsabilité nous amène à cultiver notre antifragilité (ou sinon nous mourrons). Et l’antifragilité nourrit notre désir de responsabilité.
Si je vois que je m’améliore et me renforce en adoptant une certaine posture, je vais chercher à m’y exposer le plus souvent possible.
La responsabilité et l’antifragilité vont donc devenir la drogue qui va faire de votre existence une odyssée captivante.
Voici une liste non exhaustive des bénéfices :
Avoir le sentiment de contrôler une partie de son existence
Passer d’un état d’esprit de victime à celui de créateur
Devenir un homme fiable pour soi et pour les autres
Arrêter de se croire extraordinaire
Mettre de l'ordre dans le chaos de l'existence
Ou mettre du chaos dans une existence trop ordonnée
Mais commençons par analyser pourquoi il est si difficile pour la majorité de nous de devenir des êtres responsables et antifragile.
Stéphane et le branleur nihiliste
Le Branleur nihiliste est une idée qui m’est venue en observant de près (puis de loin) le phénomène Orelsan.
De son vrai nom Aurélien Cotentin, il a développé depuis 2007, un personnage et un univers riche qui en fait aujourd’hui des artistes les plus populaires en France.
En introduction du principe, nous avons raconté l’ascension de Jocko Wilink, l’ex Navy SEAL.
Ici nous avons affaire à une ascension tout aussi fulgurante mais pour des raisons diamétralement opposées.
Là où Willink pousse son audience à se responsabiliser, à se discipliner, à être de meilleures personnes chaque jour.
Orelsan porte (malgré lui ?) un message de déculpabilisation à une jeune génération qui ne sait pas quoi faire de sa vie si ce n’est attendre le week-end pour sortir avec sa bande d’amis.
Il est intéressant d’analyser l’évolution parallèle entre le personnage (Orelsan) et l’artiste (Aurélien Cotentin).
Lorsque Orelsan commença sa carrière, l’artiste et le personnage semblaient totalement alignés.
Aurélien était le mec qui avait vécu la vie relativement banale d’un adolescent et jeune adulte français paumé vivant en France en ce début de 21e siècle.
Il est devenu légitimement le porte-parole d’une génération qui ne sait pas trop quoi faire de sa vie, qui ne comprend pas pourquoi elle fait des études, qui ne trouvent de sens ni dans son travail ni dans son quotidien et qui n’a pas de valeurs sur lesquelles se construire.
Il pose des mots sur ce que beaucoup de jeunes ressentent et ils montrent comment ils pensent, vivent et voient le monde : avec nihilisme, c’est-à-dire, que rien ne vaut vraiment la peine.
J’ai moi-même été touché par ce message pendant ma propre période de “branleur nihiliste” entre mes 19 et 22 ans.
J’étais la parfaite représentation du jeune désabusé.
Celui qui se complaît dans un environnement peu stimulant, manquant de sens et n’ayant pas autour de lui des modèles me montrant une autre possibilité que :
les soirées,
les gueules de bois en semaine,
les après-midi sans rien faire en semaine,
les discussions stériles qui tournent en boucle.
Sans parler des activités utiles et stimulantes que j’avais mises de côté dont la lecture et le sport.
Cette période, dont je suis responsable, a également impacté ma motivation et ma confiance en moi dans une discipline dans laquelle j’étais en train de performer en parallèle, le poker en ligne.
C’était ce qui me différenciait de certains de mes amis de l’époque mais je n’arrivais pas à m’extraire de ce rythme malsain, de cette vision du monde.
Cette existence nihiliste qui ne se vit pas mais qui se subit et dont je ne me croyais pas vraiment responsable.
Même si cet artiste a pu être un “looser” à un moment de sa vie, on se doute bien que depuis bien longtemps il ne l’est plus, il a même la réputation d’être un travailleur acharné.
Il y a un énorme décalage entre son image perçue et son identité réelle et le caractère qu’il a su développer depuis plus d’une décennie.
C’est ce décalage qui peut être dangereux car il a tendance à faire croire - ou aide à justifier - à certains que leur manière de vivre est valable est qu’il suffit d’attendre sur son canapé pour qu’un miracle se produise.
C’est tout l’inverse de la responsabilité et du respect de soi-même dont on doit faire preuve pour mener à bien sa vie.
Le branleur nihiliste est une période que nous traversons tous, le plus souvent à l’adolescence.
Mais il semblerait que de plus en plus d’adultes restent bloqués dans cette phase “adulescente” qui est le pire qui soit.
Car autant l’état d’esprit de l’enfant peut conférer à celui qui le maintient (ce qui est souhaitable) une joie de vivre, une curiosité et une créativité artistique rendant un adulte/enfant unique.
Mais l’adulescent est celui qui, comme bloqué entre deux univers, va flotter dans l’espace, pris dans une gravité de l’existence qui va le faire dépérir dans un nihilisme infini qui ne pourra conduire qu’à la médiocrité.
C’est cette prise de conscience à 22 ans qui m’a permis de sortir de l’adulescence, voyant ma condition à travers celles des personnes que je fréquentais.
Il était l’heure de sonner la révolte et de tuer le branleur nihiliste qui s’était emparé de moi.
La chaîne de Ponzi de la responsabilité
Qui assume encore sa responsabilité en ce début de 21ème siècle ?
Les banques et les financiers - qui sont les vrais boss du monde - s’amusent comme des enfants gâtés avec des produits financiers mettant à risque l’économie mondiale.
Les hommes politiques ne sont que trop rarement jugés à postériori pour leurs erreurs, incompétences ou fausses déclarations.
Les sociétés technologiques ne se soucient guère de la morale et du bien-être de leurs utilisateurs en créant puis optimisant leurs produits.
Rendez-vous compte, le président de Netflix, Reed Hastings, a dit que le plus grand concurrent de son entreprise était le sommeil. Cet homme fait chercher des moyens à ses ingénieurs de bousiller notre santé en regardant en boucle des séries tels des zombies.
Nous avons créé collectivement une chaîne (ou pyramide) de Ponzi de la responsabilité.
Pour rappel, une chaîne de Ponzi est un montage financier frauduleux qui consiste à rémunérer les investissements des clients essentiellement par les fonds procurés par les nouveaux entrants.
Ici l’arnaque concerne la responsabilité aux différents étages de la société.
Les “hautes instances” ayant le plus de pouvoir et d’influence n’assument pas leur responsabilité.
Celle-ci est remise sur les derniers échelons de la société, à savoir nous, les individus.
Nous le voyons au moment où j’écris ces lignes avec l’appel à responsabilité du président français concernant notre utilisation de ressources énergétiques (chauffage notamment) suite au conflit opposant l’Ukraine et la Russie et en conséquence le gel d’une bonne partie de nos ressources en gaz.
On paye le manque de responsabilité ou pourrait-on dire l’irresponsabilité de certains hauts fonctionnaires et gouvernements depuis plusieurs décennies.
Nous voici donc dans une société qui pourrait nous faire nous demander : “Y a-t-il un pilote dans l’avion ?.
Notre époque manque de grands hommes, de figures montrant l’exemple et inspirant les différentes générations actuelles à prendre leur responsabilité.
Il semble loin le temps de Marc Aurele - et est-ce un hasard si le stoïcisme revient sur le devant de la scène ?
Ou des figures plus récentes comme De Gaulle qui ont su prendre leur responsabilité et inviter un peuple ou un ensemble d’individus à faire de même.
C’est pour cela que des personnes comme Peterson et Willink crèvent l’écran, l’offre étant pauvre et la demande extrêmement forte.
Puisque lorsqu’il n’y a pas de pilote dans l’avion “sociétale”, certains d’entre nous se disent qu’il faut au moins reprendre les manettes de “son avion”.
En effet, sans assumer sa part de responsabilité, on perd toute emprise sur son présent et son futur. On devient la marionnette du destin. Dans le cas le plus extrême on finit par vivre et penser comme Stéphane.
On est tiraillé avec d’un côté l’envie de déléguer sa responsabilité à un tiers que ce soit : un homme providentiel, une idéologie, un parti politique, une religion.
Et de l’autre le sentiment de devoir se (re)prendre en main.
Nous verrons dans la deuxième partie du principe en quoi il est préférable de parier sur l’intérêt de se responsabiliser.
Malheureusement la tendance va vers une déresponsabilisation.
Les individus manquent de caractère et d’autonomie.
Le philosophe Nietzsche n’appréciait pas le christianisme qui était selon lui une religion qui avait tendance à faire la part belle aux faibles à travers sa morale - que le philosophe appelé moraline.
Celle-ci correspond à la morale chrétienne, la morale dominante et bien-pensante, le suffixe -ine est accolé à « morale » pour suggérer une substance pharmaceutique désignant un produit imaginaire permettant de donner une bonne moralité.
Nous assistons à un triple problème actuellement en conséquence à cette moraline.
Les individus étaient censés s’élever et devenir des surhommes en définissant leur propre vertu et valeurs selon Nietzsche. L’homme était amené à se dépasser/transcender ou à sombrer dans le nihilisme. Remplacer une morale imposée et subie par un ensemble de valeurs intentionnelles.
La moraline actuelle n’est plus chrétienne mais est infusée dans la société à travers les outils d’influences culturelles que sont les médias ou les plateformes comme Netflix. Il y a un camp du bien et un camp du mal, gare à ceux qui oseraient ne pas rejoindre le bon côté de la force.
Les réseaux sociaux qui pour certains allaient devenir un allié de la liberté d’expression sont devenus tout l’inverse. En effet, nous vivons dans une ère où nous sommes tous des marques ayant une réputation en ligne qui compte plus que celle du monde physique. Nous sommes arrivés à un stade où la pensée est neutralisée et orienter vers une pensée “unique” ou bien pensante. La majorité des individus vont se retrouver malgré eux à penser ou à valider des idées, influencées sans s’en rendre compte par les différents médias qu’ils consomment ou par peur d’être ostracisé.
Pourtant, la moraline n’exclut pas la responsabilité. Ce n’est pas parce qu’un individu montre sa “vertu” en ligne qu’il est un être vertueux.
Au contraire, la moraline est castratrice, alors que la responsabilité est créatrice. Nous le verrons plus tard.
Mais avant cela, il faut étudier un corollaire à cette absence de responsabilité : le sentiment nous avons à nous croire extraordinaire.
L'homme ordinaire se pensant extraordinaire
Notre génération est atteinte du syndrome “Patrick Bateman”.
Ce nom vous rappelle quelque chose ? C’est le personnage principal du roman (film du même nom) American Psycho.
Patrick Bateman travaille dans une société d’investissement, il est un golden boy new-yorkais des années quatre-vingt.
Patrick aimerait être extraordinaire mais il est parfaitement ordinaire.
Il s’habille comme ses collègues, il écoute la même musique, fréquente les mêmes restaurants, travaille de la même manière.
Pourtant, il cherche à se différencier, à prouver au monde (et à lui-même) qu’il est un être à part.
Ceux qui ont vu le film se souviendront de la scène des cartes de visite où Bateman est fier comme jamais d’avoir une carte de visite originale avant d’être dévasté par la vue d’une carte encore plus originale que la sienne (jeu de statut à son paroxysme).
Le créateur de ce personnage est l’auteur américain Bret Easton Ellis.
Je l’ai découvert au début des années 2010 via ce roman, j’ai ensuite lu ces autres romans mettant souvent en scène de jeunes gens riches et désœuvrés dans les années 80/90.
J’avais oublié cet auteur qui n’a pas publié de roman depuis 2010 jusqu’à tomber sur un essai qu’il a écrit en 2019 : White.
Dans cet essai, Ellis partage son point de vue sur l’époque actuelle : le monde post 11 septembre 2001, le monde des réseaux sociaux, le monde des millénials et de la génération Z.
Il le compare avec celui dans lequel il a grandi dans les années 70-80.
Comme nous l’avons vu, les réseaux sociaux ont tendance à uniformiser la pensée ou du moins à orienter la majeure partie d’une population vers une “bonne” manière de penser, vers des idées que l’on appelle politiquement correct.
Mais il y a aussi des postures intéressantes à prendre pour montrer patte blanche.
Les Américains appellent cela le “virtue signaling” que l’on peut traduire par la vertu ostentatoire.
Le but est de montrer sans vergogne - aux yeux de tous sur les réseaux sociaux - que l’on est un être vertueux, soutenant des causes jugées importantes tels que l’écologie ou les droits des “minorités”.
C’est d’autant plus important pour les personnes de couleurs blanches (caucasien) à une période où il y a une invitation à culpabiliser d’être les descendants de “méchants” colonisateurs et exploiteurs.
Bret Easton Ellis qui vit entre New York et Los Angeles et qui fréquente des célébrités, dont de nombreux acteurs, prend l’exemple de la sortie du film Moonlight en 2016 sur l’histoire de Chiron, un Afro-Américain homosexuel qui eu beaucoup de succès à Holywood obtenant notamment l’oscar du meilleur film en 2017.
Pour un Blanc, approuver Moonlight, c’était se sentir vertueux. Bien qu’il soit agréable de se sentir vertueux, il convient de se demander si se sentir vertueux et être vertueux sont en fait la même chose. La presse de l’industrie du spectacle l’a porté aux nues non parce que c’était un grand film, mais parce qu’il avait coché toutes les cases de notre obsession du moment concernant la politique identitaire. Le personnage principal était gay, noir, pauvre, martyrisé et victime.
Je ne vais pas développer le sujet de la propagande médiatique/culturelle (qui comporte son lot de bonnes et de mauvaises raisons) concernant les diverses minorités dans ce livre.
Ce qui m’intéresse c’est la motivation qu’il peut y avoir derrière ces comportements de soutiens publics pour afficher sa dite vertu.
Ceci semble à la fois une manière d’être accepté par le groupe tout en étant une façon de se différencier.
Un exemple parmi d’autre de l’ambivalence que nous ressentons tous plus ou moins fortement d’être accepté par le groupe tout en essayant de s’en distinguer.
Il y a un outil encore plus puissant que les Stéphane de notre époque utilisent encore et encore : la victimisation.
C’est l’art de chercher l’attention en mettant en avant des éléments “injustes” nous concernant.
Éléments pouvant aller du plus ridicule (j’ai raté mon examen, le monde est injuste) à des raisons “valables” tel qu’une grave maladie.
Le mécanisme reste le même, on va dramatiser son expérience de vie de manière à générer “des vues” sur les réseaux sociaux et développer “sa marque.
C’est ce que Ellis l’économie de la réputation.
On pourrait pourtant se demander si cette stratégie est la meilleure pour jouir d’une bonne réputation.
Mais vu le phénomène et les résultats qu’obtiennent ceux employant cette stratégie, elles semblent “rentables” de ce point de vue.
Au moins, ce sont des personnes qui savent “exploiter” une partie du zeigest (l’esprit du temps que nous avons développé dans le principe #6).
En observant, c’est différent phénomènes, j’en suis arrivé à me demander si la chose la plus extraordinaire que l’on pouvait faire à notre époque ne serait pas d’assumer et d’accepter pleinement son ordinarité.
Nous serions tel “Le Sauvage” dans Le meilleur des Mondes.
L’un des derniers hommes naît naturellement. Il a un physique et un mental dans la norme.
Dans Le Meilleur des mondes les personnages sont extraordinaires car augmentés artificiellement mais ordinaire puisque des copies presque conformes les unes des autres. L’être le plus extraordinaire du roman est le Sauvage qui est pourtant tout à fait banal.
Nous vivons une époque qui cherche à nier et refuser les différences entre les individus.
Pourtant nous sommes tous différents ne serait-ce que par notre génome. Mais aussi par la combinaison unique d’influences sociales, culturelles, familiales, éducatives etc.
On devrait s’inspirer des gens réalisant des choses extraordinaires pour essayer à notre tour de produire de l’extraordinaire, dans un domaine important pour nous, si telle est notre quête.
Cette quête étant sublimée dès lors que l’on accepte que l’on ne soit pas un génie ou un être hors norme.
Mais il est bien plus simple de se plaindre, de jouer la victime et de vouloir tirer le monde vers le bas avec des idéologies nihilistes que de se responsabiliser et se donner les moyens d’accepter son caractère ordinaire.
Il existe un dernier phénomène expliquant selon moi les difficultés qu’on peut éprouver, à épouser notre responsabilité.
Celui des “safe spaces” créé pour ne surtout pas offenser ces personnes se croyant hors norme dans leur génie ou leur malheur.
La société du safe space
Notre société occidentale contemporaine produit des individus fragiles.
C’est le revers de la médaille de certains progrès technologiques et sociaux.
Nous vivons une époque qui essaye de dépasser l’égalité des droits en la transformant en une égalité des résultats.
Les fameux médias/réseaux sociaux donnent l’illusion à chacun d’être en mesure d’être hors norme, de devenir riche, de devenir une célébrité, le tout sans efforts apparents.
Puisque la réalité est tout autre, les “gagnants” de ces jeux étants moins nombreux que les “perdants” nous assistons à un changement de “règle” où dorénavant toute hiérarchisation d’individus dans un domaine est pointée du doigt.
Le discours dominant est celui du '“tout le monde gagne” couplé à celui du “vous êtes tous extraordinaire”.
Certaines écoles veulent arrêter le système de notations jugé démoralisant. On instaure des quotas pour s’assurer que “tout le monde” puisse réussir.
C’est comme si l’on faisait tout pour faire oublier aux individus que “la vie est souffrance” comme le savent les bouddhistes et qu’il faut apprendre à l’accepter.
Mais que c’est cette souffrance et les obstacles à franchir qui font de la vie une expérience vivante justement.
Il est nécessaire d’apprendre que tout ne peut aller toujours dans notre sens.
Qu’il existe des différences entre deux personnes qu’ils soient de même sexe ou de sexe opposés.
Nous ne naissons pas égaux et nous n’aurons jamais des résultats égaux.
Ce n’est ni bien, ni mal, c’est ainsi.
Or, non seulement content de vivre à l’époque la plus confortable de l’Histoire, nous avons décidé d’y ajouter des protections pour éviter de heurter la sensibilité des “bisounours” du 21ème siècle.
On surprotège les enfants de peur qu’ils se blessent physiquement et psychologiquement.
On finit par leur retirer toute situation leur permettant de développer une antifragilité - qu’ils sont pourtant les plus aptes à développer, il suffit de voir comment se débrouille par eux-mêmes des enfants dans un parc lorsqu’ils jouent. Ils sont imaginatifs et trouvent toujours une solution.
Bret Easton Ellis témoigne de son enfance beaucoup plus libre :
Nous étions des enfants qui erraient dans un monde presque uniquement fait pour les adultes. Personne ne se souciait de ce que nous regardions ou pas, de ce que nous ressentions ou voulions, et le culte de la victimisation n’avait pas encore commencé à exercer sa fascination. C’était, en comparaison de ce qui est aujourd’hui acceptable et des enfants couvés dans l’impuissance, une époque d’innocence.
De plus, la vie étudiante se retrouve aussi gangrenée par des phénomènes analogues, à cette tendance à surprotéger les individus.
Je fais référence aux “safe spaces” que l’on trouve dans les universités américaines. Ce terme désigne des lieux "destinés à être exempts de tout préjugé, conflit, critique ou action, idée ou conversation potentiellement menaçante".
Nous avions vu que la stratégie de la victimisation fonctionne à merveille dans la société de “la marque personnelle” et l’économie de la réputation.
À cela, il faut ajouter “la génération des offensés” qui ne supportent plus la contradiction, le conflit et la critique.
Ces lieux sûrs sont le fruit du mouvement LGBTQ+ et autres mouvements de justice sociale.
Je ne débattrai pas ici de leurs raisons d’exister initiales, je préfère analyser les conséquences de ce type d’initiative - qu’elles soient bonnes ou mauvaises.
On se retrouve donc avec des millions de jeunes aux Etats-Unis, mais aussi maintenant en Europe, qui vont passer leurs années étudiantes confortés dans l’idée qu’il est intolérable de laisser quelqu’un ayant un avis différent du nôtre, avoir la possibilité de s’exprimer (dans la même pièce qu’eux).
On reproduit les “bulles” générés par les algorithmes sur Internet, dans le monde physique.
Si vous n’êtes pas familier avec ce phénomène, allez voir le documentaire sur l’université Evergreen disponible en français sur Youtube.
Les conséquences sont désastreuses puisque ces jeunes ne développent aucune antifragilité ni capacité à se rendre responsable de leur vie ou de leurs problèmes. Tout devient la faute d’un autre individu ou d’un groupe/ennemi.
Cette tendance n’est pas confinée aux enceintes universités puisque nous voyons le même schéma se produire sur les réseaux sociaux qui sont devenus le chantre du politiquement correct et de la bien-pensance.
La société de l’image et l’économie de la réputation sont encore les raisons primaires poussant les individus à soit rejoindre la police de la pensée prête à bannir toute personne ne tenant pas les propos attendus par “l’empire” comme l’appelle Bret Easton Ellis.
Et s’ils ne rejoignent pas la police de la pensée, ils vont se censurer et/ou avoir des propos influencés par la peur de l’ostracisation.
C’est une époque qui juge tout le monde si sévèrement à travers la lorgnette de la politique identitaire que vous êtes d’une certaine façon foutu si vous prétendez résister au conformisme menaçant de l’idéologie progressiste, qui propose l’inclusion universelle sauf pour ceux qui osent poser des questions. — White de Bret Easton Elliss
La guillotine médiatique est prête à couper la tête de ceux et celles qui oseront offenser les intouchables.
Ces phénomènes interconnectés annihilent toutes possibilités de bâtir une société composée d’individus fiable, responsable et antifragile.
C’est le cycle d’une société :
Les temps difficiles produisent les hommes forts, les hommes forts engendrent les temps de prospérité et de stabilité. Les temps de prospérité et de stabilité produisent les hommes faibles, les hommes faibles produisent les temps difficiles. — Proverbe oriental
Notre civilisation a connu d’immense progrès ces 500 dernières années.
Nous arrivons à la fin d’un cycle où notre société trop confortable et prospère nous a conduits à produire des Hommes faibles qui créent les conditions de temps difficile à venir.
De plus, comment mener une vie intentionnelle lorsqu’on se retrouve bridé par une police de la pensée cherchant à uniformiser et simplifier ce qui serait le “bien”.
Ceci est l’antithèse de ce que vous devez rechercher pour devenir un véritable individu
Mais ce n’est pas bien grave, car comme nous allons le voir, en tant qu’individu il est possible de s’extraire de ce marasme.
Et ainsi d’être en mesure d’aider les personnes qui comptent pour vous : votre famille, votre communauté, votre audience.
“Conclusion”
Nous verrons, la semaine prochaine, dans la deuxième partie de ce principe, comment devenir des individus plus responsables et antifragile.
Avant cela, voici ce qu’il faut retenir de la première partie de ce principe #4 :
Le marché semble réclamer et avoir besoin de leaders sur le thème de la responsabilité individuelle.
La responsabilité et l’antifragilité se nourrissent mutuellement
Le branleur nihiliste est une phase de laquelle il faut s’extraire pour devenir un véritable adulte, cela passe notamment par le choix de son environnement et de ses influences.
Commencez par vous responsabiliser pour vous et vos proches avant d’attendre quelque chose des autres — et n’attendez rien des hautes administrations, politiques, idéologies.
Vous êtes ordinaire et vous devez l’accepter, ce qui n’empêche en rien de mener une existence extraordinaire si tel est votre souhait.
Il ne faut pas succomber aux sirènes de la victimisation et à la pratique du "virtue signaling”
Vous devez éviter les safes spaces et cultiver le dialogue exploratoire ainsi que les “dangerous space”, des endroits pour confronter ses idées et se rapprocher avec vos “opposants” de la vérité.
Je m’arrête ici pour cette semaine.
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Premiers arrivés, premiers servis.
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Passez une bonne semaine et à lundi prochain !
JCK from Budapest 🇭🇺
Merci Jean-Charles
Tu prends de l’épaisseur intellectuelle au fil des tes lettres. C’est un régal. La SEULE newsletter que je lis avec attention et jusqu’au bout. Bravo jeune homme !
Merci beaucoup. Cela donne vraiment envie de lire ton livre.